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J'ai été interviewée

Dernière mise à jour : 5 févr. 2021

La grande aventure qui débute lorsque l'on quitte le sentier battu de l'hôpital pour exercer son métier d'une manière différente, permet de faire quelques détours qui donnent l'occasion de belles rencontres.


Celle avec Gaël & Laure de Petit mais costaud en est une.

Je suis très enthousiaste par leur projet initial dont je vous ai déjà parlé et qui permet aux parents de bébés prématurés d'accéder plus facilement et à moindre coût à des vêtements adaptés pour leur bébé mais ils fourmillent d'idées et sont en train d'élaborer eux-mêmes une gamme de vêtements spécifiques pour les prématurés hospitalisés en partenariat avec une styliste et une professionnelle de santé spécialisée dans ce domaine.


Ils m'ont donné l'opportunité de réfléchir et de rédiger un article sur l'allaitement dans un contexte de prématurité et aujourd'hui, ils ont la gentillesse de me présenter, de relater mon histoire et de donner de la visibilité à ma profession, particulièrement auprès des prématurés et de leur famille.

Vous pouvez retrouvez mon interview sur leur blog ou le découvrir ci-dessous.



Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

Je suis infirmière depuis fin 2002 et j’ai enchainé tout de suite après mon diplôme pour me spécialiser pendant une année supplémentaire en pédiatrie et devenir infirmière puéricultrice en décembre 2003.

J’ai alors intégré un service de réanimation néonatale qui possède une aile réa / soins intensifs (SI) et une autre de néonatologie dans un hôpital de la banlieue parisienne.

Un service très agréable pour travailler car il ne comporte pas trop de lits et permet d’être sur tous les secteurs (réa, SI et néonat) et de suivre l’évolution des bébés.

De plus, il se trouve que j’ai eu la chance d’intégrer l’unité au moment de son passage en niveau III et de participer à différents groupes de réflexions et de travail mis en place à cette époque.

J’y suis restée pendant 16 ans et j’y suis devenue référente allaitement au fil des années.


En mars dernier, j’ai décidé de me lancer dans l’aventure des consultations de puéricultrice en libéral à domicile et à distance pour accompagner les parents à l’arrivée de leur bébé ou après une hospitalisation pour prématurité, ainsi que la mise en place de la lactation et de l’allaitement.

Une réelle aventure puisque c’est un statut non reconnu et non conventionné (donc non pris en charge) lorsqu’il s’agit de parentalité ou d’allaitement, sans soins techniques associés.


En parallèle, je viens d’être diplômée en lactation et allaitement maternel à la faculté de médecine de Lille (DIULHAM) en 2020 afin de devenir conseillère en lactation.


Pourquoi avez-vous choisi de devenir infirmière puéricultrice ?

C’est un choix qui s’est forgé doucement au fil des années.

J’ai commencé par une année de médecine (avec en tête de devenir pédiatre réanimateur) qui n’a pas été concluante et j’ai choisi ensuite de me réorienter vers la profession d’infirmière qui me donnait un grand choix de secteurs d’exercice.

Je n’ai pas été déçue car j’aime beaucoup la place spécifique des infirmières auprès des patients.


Pendant mes études, j’ai beaucoup aimé mes stages aux urgences, au SMUR et en réa adulte mais également en néonat et j’ai choisi de faire mon mémoire de fin d’étude sur la parole auprès des bébés pendant les soins.

J’avais très envie de me spécialiser pour poursuivre mes études et entre les 3 possibilités (infirmière de bloc, infirmière anesthésiste et infirmière puéricultrice), il était logique de choisir la dernière.


Je n’ai jamais regretté ce choix par la suite et me suis vraiment épanouie dans cette formation.

Une fois mon diplôme en poche, je suis revenue vers un univers qui me passionnait, la réa, avec l’envie de faire également du SMUR pédiatrique mais j’ai adapté mon choix en choisissant un lieu d’exercice proche de chez moi qui m’a parfaitement convenu : une unité de réa/SI/Néonat en pleine évolution et avec de nombreux projets.


Quel est le quotidien d'une infirmière en réanimation néonatale ?

Il peut être très varié en fonction de la taille de l’unité et du fonctionnement spécifique du service, mais également de l’activité du jour…

Ce qui est certain, c’est qu’on ne sait jamais à l’avance ce qui va arriver au cours de la journée !

L’infirmière puéricultrice travaille de jour, de nuit, en semaine, le week-end et les jours fériés sans que ça ne modifie son travail.


La plupart des réas sont maintenant en 12h, ce qui est souvent apprécié car cela permet une prise en charge globale pour mieux s’organiser, respecter le rythme de l’enfant et permettre la continuité des soins, mais aussi moins d’interlocuteurs différents pour les parents au cours de la journée (et souvent pendant plusieurs jours de suite).


Les infirmières puéricultrices s’occupent d’appliquer les prescriptions médicales effectuées par les pédiatres (préparation et pose des traitements, soins spécifiques, examens…), elles les secondent dans certains gestes techniques pour accompagner au mieux le bébé et prévenir la douleur (pose de voie centrale, intubation, gestes spécifiques…) mais également lors des rendez-vous avec les parents pour discuter ensemble de l’évolution des bébés.


Les infirmières puéricultrices ont également un rôle propre, c’est-à-dire sans prescription médicale. De par leur expertise et leur connaissances spécifiques de l’enfant, elles adaptent leur façon de prendre en soin les bébés en tenant compte des recommandations liées aux soins de développement (positionnement, respect du rythme, évaluation de la douleur ou de l’inconfort, des signes d’éveil ou de faim, environnement sonore, lumineux, olfactif, tactile, préservation de la zone orale…).


Elles veillent également à privilégier une proximité constante avec les parents de l’enfant (et plus largement sa famille lorsque cela est possible) en les incluant au maximum dans la prise en charge quotidienne de leur enfant afin d’en faire de véritables partenaires de soin.

Elles sont d’ailleurs les premières interlocutrices des parents et permettent souvent de faire le lien avec l’équipe médicale, de réexpliquer la situation ou d’offrir une oreille attentive.

Elles effectuent aussi les soins de nursing du bébé (pesée, toilette, alimentation, portage…) en partenariat avec les auxiliaires de puériculture avec qui elles travaillent en binôme. Ces dernières effectuent d’ailleurs leurs soins sous la responsabilité des infirmières.


Enfin, elles ont aussi un rôle administratif et logistique (gestion des dossiers, transmissions, commandes, désinfection, lien avec les PMI, les assistantes sociales, les psychologues et autres partenaires pluridisciplinaires…) et sont responsables de la formation et de l’encadrement des étudiants en stage.


Y-a-t-il eu un/des moments qui vous ont particulièrement marquée ?

Je me souviens très bien de mes 6 premiers mois en tant que nouvelle puéricultrice dans le service.

Trouver ces marques, son positionnement en tant que puéricultrice (qui ne correspond pas forcément aux pratiques du service), une assurance dans les gestes techniques mais aussi dans l’accompagnement des parents. On dit qu’il faut compter un an pour se sentir plus à l’aise.

Je ne me suis jamais sentie stressée pendant mes gardes mais j’ai beaucoup cauchemardé la nuit les premiers mois !


Sinon, j’ai beaucoup de souvenirs gravés en moi, de rencontres formidables avec des parents qui m’ont fait confiance et que j’ai accompagnés pendant de longues semaines, de moments partagés avec les bébés, de cette inquiétude lorsqu’ils vont moins bien et de ce plaisir immense lorsqu’ils quittent enfin le service. De la gentillesse de toutes ces familles, de leurs messages, de leurs cadeaux, de toutes ces histoires de vie qu’on a partagé à un moment.

J’ai plein de noms et de visages qui resteront à jamais gravés dans mon esprit et d’autres que j’ai le plaisir de continuer à voir grandir au fil des ans.


Je conserve aussi en moi tous ces moments de deuil que j’ai accompagné : les échanges de regard, les larmes partagées, les mains tenues, les bras grand ouvert pour accueillir la peine à défaut de la soulager.

La mort fait aussi partie des moments de réa-néonat et je suis très fière d’avoir pu accompagner du mieux que je le pouvais les parents qui ont dû traverser cette épreuve.

Ce sont des moments très forts qui sont inoubliables…


Quelle est votre vision de la prématurité, et de la manière dont elle est comprise et accompagnée aujourd'hui ?


La prise en charge de la prématurité a considérablement évolué depuis 40 ans mais ce qui est formidable, c’est que cette évolution se poursuit de façon dynamique et constante et que j’en ai été témoin sur mes 16 années d’exercice à l’hôpital.


Même si le NIDCAP n’est pas applicable partout tel quel, la philosophie des soins de développement a beaucoup progressé au sein de l’hôpital et de plus en plus de soignants y sont sensibilisés et tentent d’adapter leur pratique quotidienne à ces principes. Chaque action dans ce sens est bénéfique au bébé prématuré et à l’amélioration de la qualité de sa prise en charge.


Une grande disparité existe encore en fonction des services (on a pu le constater récemment lors des épisodes de confinement) mais la place des parents au sein des unités auprès des bébés s’est considérablement améliorée (même s’il reste encore beaucoup à faire) et ces derniers sont de plus en plus considérés comme partenaires de soins (ce qui fait partie des recommandations des soins de développement).


On doit tout cela aux soignants (la SFN par exemple : Société Française de Néonatologie) mais aussi aux associations qui ont fait entendre la voix des parents pour informer les professionnels sur le quotidien des familles confrontées à la prématurité.

Je pense particulièrement à SOS Préma qui grâce à ses Journées Des Soignants depuis plus de 15 ans permet de proposer aux soignants le retour des parents de bébés prématurés afin d’améliorer leur pratique professionnelle.

La création du GREEN (Groupe de Réflexion et d'Évaluation de l'environnement des Nouveau-nés), qui regroupe des médecins et des infirmières puéricultrices, des professions paramédicales et des associations d’usagers comme SOS Préma et le CIANE (Collectif Inter Associatif autour de la NaissancE) et propose des recommandations de bonne pratique en néonatologie, est un véritable atout.

On trouve également des standards de soins européens pour la prise en charge du nouveau-né grâce au EFCNI (European Fondation for the Care of the Newborn Infants)


La prise en charge de l’enfant, et plus particulièrement celle du nouveau-né et du prématuré, est de plus en plus prise en considération et de nombreuses études voient le jour pour étayer de nouvelles pratiques de soin, c’est donc plutôt encourageant.


Cependant, il ne faut rien lâcher et continuer à défendre une prise en charge de qualité pour les enfants en réclamant des professionnels spécialisés à leur côté comme les infirmières puéricultrices et ne pas laisser des politiques de restriction budgétaire remettre en cause le ratio de soignants défini dans le décret de périnatalité pour s’en occuper.

Et toujours maintenir formations et informations pour les professionnels de santé sur l’évolution des connaissances.


Qu'est-ce qui vous a amenée à créer Bidiboo ?

De quel constat êtes-vous partie ?

Mon malaise a débuté il y a 4-5 ans lorsqu’on a commencé à me faire remarquer que je passais trop de temps dans les chambres auprès des parents. Que c’était chouette d’accompagner les allaitements mais que c’était utopique par rapport à la réalité de la charge de travail quotidienne dans le service.


J’ai alors décidé de prendre sur moi, de faire tampon pour coller aux réalités du service, du manque de personnel, de l’augmentation des tâches tout en proposant la même qualité d’écoute, de prise en charge et de temps auprès des parents. Mais cela m’a usée et j’ai fini par me sentir maltraitante de façon involontaire puis au final, maltraitée moi-même par le système de santé.


Je l’ai d’autant plus admis il y a 2 ans lorsque la voix des soignants a commencé à s’élever et je n’en ai plus douté lorsque les médecins ont à leur tour poussé un cri d’alarme et de désespoir en décembre 2019 sur l’état de santé du système de santé français