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L'arrivée à la maison d'un bébé prématuré

Se projeter dans l’avenir lorsqu’on accouche prématurément


Quel que soit le terme et le niveau de prématurité, chaque parent ne réussit à tenir la durée de l’hospitalisation que dans l’unique but de récupérer enfin son bébé et de rentrer avec lui à la maison, comme cela se fait pour tout nouveau-né.


C’est d’ailleurs une des premières questions qui leur vient à l’esprit :

« Ça va durer combien de temps ? Quand pensez-vous qu’on sortira ? »

Et ce, que le bébé soit né à 27 SA*, 32 ou 35…


Se projeter, retrouver la normalité de toute naissance : rentrer avec un bébé à la maison.

Il est parfois plus facile pour un parent de très grand prématuré de 26 SA d’accepter qu’il faille du temps pour que son bébé devienne suffisamment mature, puis autonome pour enfin sortir alors qu’il est insupportable pour d’autres de patienter presque 15 jours le temps que leur bébé de 36SA devienne autonome pour s’alimenter…


Comme dans beaucoup de processus d’adaptation, chacun possède sa propre temporalité pour y parvenir et chaque situation est unique et à évaluer de façon individualisée.



A chacun sa temporalité pendant l’hospitalisation


Lorsque l’hospitalisation a été réduite à quelques jours ou quelques semaines et que le bébé va très bien, la sortie n’est souvent qu’une formalité comparable à celle de la maternité.

Cependant, cela n’empêche pas l’utilité d’un accompagnement individualisé ensuite car la création du lien maternel et pu être malmené par l’hospitalisation et les conditions de sa réalisation (séparation ou chambre mère-enfant, maman sortie ou hospitalisée, mise au sein tardive…).


Le processus est un peu différent lorsque l’hospitalisation a duré plusieurs mois.

Chaque évènement, qu’il soit difficile ou heureux, a été vécu en partenariat et accompagné par l’équipe pluridisciplinaire.

Les parents ont eu l’habitude de trouver un interlocuteur relativement facilement dès que nécessaire.

Ils ont pu poser leurs questions, plusieurs fois si besoin, à différentes personnes pour avoir plusieurs avis.

Ils ont bénéficié de la logistique hospitalière pour les consultations annexes, les opérations, les bilans, les examens de contrôle et leur enfant a pu recevoir sans trop de difficultés les soins et l’expertise de kinés, de psychomotriciens, d’orthophonistes ou de psychologues.


Au cours de ces longues semaines, les parents ont trouvé un certain équilibre qui leur permet, et c’est le but, d’avancer le plus sereinement possible en même temps que progresse leur bébé.

Le passage en néonatologie est déjà une étape très attendue mais également redoutée.

Ils sont toujours à l’hôpital, mais les soignants ont plus de bébés à charge (puisqu’ils ne nécessitent plus autant de soin spécifiques) et certains parents peuvent se sentir abandonnés avec leur bébé.

C’est alors aux soignants d’expliquer l’évolution de la situation, les compétences de leur bébé et de les accompagner vers l’autonomie parentale en leur apprenant à comprendre leur bébé.

C’est surtout à mon sens, un service qui permet de faire la transition entre la technicité de la réa et l’arrivée à la maison.

Apprendre à se faire confiance, à se détacher des machines, à se rassurer dans ses propres compétences parentales et dans celle de ce petit bébé qui a tant progressé depuis sa naissance.


La sortie tant espérée devient alors plus ou moins redoutée à partir du moment où elle commence à être évoquée.

Comment passer de cet univers tellement soutenant à un face à face tous seuls à la maison ?



Accompagner la sortie


Beaucoup de services l’ont compris et proposent des sorties avec un accompagnement en HAD (Hospitalisation A Domicile) de façon systématique en-dessous d’un certain terme, même lorsque le bébé va bien, afin d’accompagner plus sereinement les parents.

Et plus particulièrement la maman, car 3 mois après la naissance, le papa n’a pas forcément la possibilité de poser des jours de congé pour être présent avec eux à la maison.


Tous ceux qui ne bénéficient pas de l’HAD vont donc se tourner vers les PMI (Protection Maternelle et Infantile) sur les conseils des équipes soignantes qui établissent des transmissions avec les centres concernés pour une continuité de l’accompagnement avec les puéricultrices référentes.

Cependant, les PMI ne sont malheureusement pas forcément présentes dans toutes les villes de France et les puéricultrices qui y travaillent ont un nombre de missions extrêmement importantes et variées (agrément des assistantes maternelles, bilan scolaire, protection de l’enfance, visites à domicile, consultations de suivi…) qui ne leur permet pas forcément de prendre le temps nécessaire au domicile de ces familles.

Et lorsque le personnel qui y travaille n’est pas spécialisé, la spécificité de la prématurité n’est pas forcément entendue et comprise à sa juste valeur et peut provoquer certaines incompréhensions avec les familles (courbes de croissance un peu différentes, risques spécifiques, allaitement…).


Enfin, les parents doivent souvent trouver par eux-mêmes les différents acteurs de soin nécessaires au suivi de l’enfant car les CAMSP (Centre Action Médico Sociale Précoce) n’ont pas forcément de disponibilité pour une prise en charge globale avant de long mois et l’on sait combien il est important de le débuter de façon précoce.



Une autre alternative possible : la reconnaissance des consultations spécialisée des puéricultrices


Ces témoignages, j’y ai été confrontée dans mon service avec les parents que j’ai accompagnés tout au long du séjour de leur bébé et avec lesquels nous avons essayé de préparer une sortie la plus sereine possible.


J’ai eu la chance aussi de modifier ma vision de cette arrivée à la maison (et non pas retour à domicile comme on le dit souvent à tort) grâce à l’association SOS Préma et les témoignages de tous ces parents confrontés à la prématurité, partagés lors des Journées des soignants chaque année depuis 12 ans.

Cela a modifié ma pratique dans le service et m’a fait réfléchir à l’évolution de notre prise en charge afin de diminuer le stress parental, les problèmes de courbes de poids non optimales, les passages aux urgences inadaptés ou les ré-hospitalisations précoces après la sortie et prévenir les différents risques de souffrance intra-familliale et d’épuisement parental.


C’est la raison de mon nouveau projet professionnel de consultation spécialisée de puéricultrice libérale pour l’accompagnement des parents lors de l’arrivée à la maison d’un bébé (prématuré ou non) et le soutien à l’allaitement (encore plus nécessaire lorsque le bébé est né prématurément).

Un accompagnement non « technique » (ce dernier étant déjà proposé lors des sorties avec oxygène, sonde alimentaire, ou soins spécifiques) mais de soutien à la parentalité, non moins essentiel.


Proposer aux parents un temps d’échange, à domicile, pour leur éviter de multiplier les sorties extérieures, respecter le rythme de l’enfant et privilégier son sommeil, mais également pour préserver la jeune maman, souvent épuisée et lui permettre d’être dans un lieu où elle se sent bien pour se confier.


Car il s’agit surtout de prendre le temps d’écouter les parents, de visualiser leurs éventuelles difficultés dans leur environnement personnel, de comprendre ce qui peut les angoisser dans le quotidien avec bébé et de les aider à verbaliser leurs émotions contradictoires (« Je suis tellement heureuse et pourtant je me sens tellement triste… »).


On se retrouve souvent démuni face à son bébé que l’on n’a pas forcément côtoyé 24h/24 pendant l’hospitalisation et qui peut sembler différent une fois rentré à la maison par rapport à ce que l’on connaissait de lui :

« Il pleure beaucoup plus avec moi ! Il boit moins bien, il dort peu… »

Non madame, c’est seulement que vous n’aviez qu’un aperçu du temps passé en sa compagnie à l’hôpital, maintenant vous vivez avec lui 24h/24. Ce n’est pas que vous ne savez pas faire, c’est seulement qu’il faut prendre le temps de le découvrir un peu différemment et de trouver votre équilibre ensemble. Faire connaissance…


Avoir supporté tant de stress et de difficultés, d’angoisse de mort ces derniers mois pendant l’hospitalisation peut d’un coup ressortir de façon plus violente, désemparer les parents, les fragiliser et les laisser démunis face à leur bébé, qui pourtant va bien ou ne présente qu’un simple rhume…

Garder les réflexes de l’hôpital mais s’habituer à une vie normale.

Accepter que tout va bien mais s’inquiéter pour le « après », ne pas trop le couver mais rester vigilant quand même…


Le soutien a l’allaitement est également primordial pour les bébés prématurés car leurs mamans se sont battues pour maintenir leur lactation pendant de nombreuses semaines dans l’espoir d’obtenir enfin un allaitement au sein, au moins partiel lors de la sortie.

Il faut les accompagner et les soutenir de façon adaptée pour éviter cette éventuelle pression autour de la prise de poids optimale attendue, déjà très forte pour les bébés à terme allaités mais exacerbée lorsque le poids de sortie ne dépasse pas les 2800g pour certains prématurés ou bébés hypotrophes avec retard de croissance.


Offrir un temps d’accompagnement et d’écoute individualisé c’est permettre une transition plus sereine entre l’hôpital et la maison.


La prématurité ne s’arrête pas lorsque l’on quitte le service de néonat pour rentrer ensemble à la maison avec son bébé…

C’est la suite d’un long chemin qui débute et qui nécessite tout autant d’être soutenu et accompagné.


* SA = Semaine d’Aménorrhée, nombre de semaine depuis les dernières règles (15 jours de plus que les semaines de grossesse)


Cet article a été rédigé pour participer au blog de Mariama Bouibed, infirmière puéricultrice, qui valorise la spécificité des infirmières puéricultrices et leurs champs de compétences sur son site www.parentalite-petiteenfance.com




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